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30 octobre 2017 1 30 /10 /octobre /2017 20:33
Rosa Luxemburg

 

 

La vie, donc. La vie, au risque de la perdre en son nom. Rosa, depuis sa prison: « La fraternité universelle des travailleurs est pour moi ce qu'il y a de plus haut et de plus sacré sur terre, c'est mon étoile, mon idéal, ma patrie, je préférerais renoncer à la vie plutôt que d'être infidèle à cet idéal.» Ce romantisme révolutionnaire n'est en rien une naïveté, mais bien plutôt une droiture. Façon, tout simplement, de prendre au sérieux ce que l'on affirme et défend, par la parole ou par l'écriture. Les écrits épistoliers de la prisonnière Rosa Luxemburg ont ceci d'irremplaçable qu'ils donnent à voir et à comprendre la vérité de cette forme d'engagement total pour la cause des opprimés, des exploités et des démunis, à rebours des vulgates conservatrices qui, proliférant de nos jours telle fumier sur les décombres du communisme réel, assimilent ces choix de vie à des folies criminelles.

Edwy Plenel introduction à "Lettres de Rosa Luxemburg, Rosa, la vie"
 

 

A Louise Kautsky

La vie joue éternellement à cache-cache avec moi. J'ai toujours le sentiment qu'elle n'est pas en moi, là où je suis, mais quelque part au loin.

p 36

 

A Louise Kautsky

Mais il faut bien pourtant que j'aie quelqu'un pour me croire quand je dis que si je virevolte dans le tourbillon de l'Histoire, c'est par erreur, et qu'au fond, je suis faite pour garder les oies. Tu dois me croire, tu m'entends ?

Et puis, je ne suis absolument pas d'accord quand tu m'écris sur un ton résigné que tu ne peux rien être pour moi. Mais si, tu es et tu dois être ... le port (excusez du peu !) où je peux courir me réfugier de temps à autre, quand le diable vient me chercher en catimini, pour que nous puissions bavarder et rire ensemble, et écouter Hans nous jouer les Noces de Figaro.

P 56

 

A Hans Diefenbach

Donc, attendez-vous à tout ! Je ne sais pas du tout ce que je vais devenir; je suis, vous le savez, une terre aux possibilités illimitées.

[…]

Et puis, ma compassion, comme mon amitié, ont des limites très claires: elles s'arrêtent à l'endroit exact où commence la bassesse. Mes amis se doivent de faire les choses bien, dans leur vie publique, et dans leur vie privée, y compris la vie très privée. Clamer publiquement de grandes phrases sur

la « liberté de l'individu », et dans le privé, obéir à la démence d'une passion et aliéner l'âme d'un homme - je ne le comprends pas, et je ne le pardonne pas.

P 74 - 75

 

A Mathilde Wurm

Te souviens-tu de ces lignes au dos de l'ouvrage du grand État-major qui relatait la campagne de von Trotha dans le Kalahari ?  « Et les râles des agonisants, les cris de démence des hommes qui mouraient de soif se perdaient dans le silence sublime de l'immensité. » Oh! Ce « silence sublime de l'immensité», où tant de cris se perdent sans avoir été jamais entendus, résonne en moi si fort qu'il n'y a pas dans mon coeur un petit coin spécial pour le ghetto: je me sens chez moi dans le monde entier, partout où il y a des nuages, des oiseaux et les larmes des hommes.

P 104 – 105

 

A Hans Diefenbach

D'ailleurs, tout serait beaucoup plus facile à vivre si je n'oubliais pas le commandement que je m'étais fixé dans la vie: l'essentiel est d'être quelqu'un de bon. Si on est bon, juste bon, tout se résout et se tient, et c'est bien mieux que toute l'intelligence et l'obstination du monde.

P 111

 

 

A Louise Kautsky

Et puis surtout, les nuages ! Quelle inépuisable source de ravissement pour deux yeux humains! Hier, samedi, dans l'après-midi, aux environs de cinq heures, j'étais appuyée à ma clôture de fil de fer qui sépare le petit jardin du reste de la cour, et je me faisais chauffer le dos au soleil en regardant vers l'est. Sur le fond bleu pâle du ciel s'élevait une montagne de nuages d'un gris très tendre, sur laquelle planait une faible lueur rosée; on aurait dit un monde très lointain où régnaient une paix, une douceur, une délicatesse infinies. C'était comme un sourire léger, comme un vague et beau souvenir d'une jeunesse lointaine, ou comme certains matins, quand on se réveille avec la délicieuse sensation d'avoir rêvé quelque chose de très beau sans arriver à se rappeler ce que c'était.

P 129

 

 

https://blogs.mediapart.fr/edwy-plenel/blog/290909/rosa-luxemburg-vivante

 

https://blogs.mediapart.fr/philippe-corcuff/blog/220909/rosa-luxemburg-1871-1919-des-contradictions-de-l-action-emancipatrice-aux-rivages-de-l-intimit

 

 

 

 

 

 

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